« Juif né en Allemagne, formé au Conservatoire national de Paris », Simha Arom est en 1963 corniste de l’orchestre symphonique de la radio israélienne.
Pour rompre la monotonie de son travail et par curiosité, il accepte la proposition du ministère israélien des Affaires étrangères de former en un an une fanfare en République centrafricaine. L’Etat d’Israël nouait des coopérations technologiques, militaires et culturelles très intenses en Afrique S’il ne crée pas cette fanfare - deux existaient déjà -, il fonde une chorale de jeunes en valorisant les chants traditionnels des ethnies centrafricaines. Fort de ce succès, il propose au président Dacko de recueillir le patrimoine musical du pays et de créer un musée des Arts et traditions populaires (musée national Boganda). Ce qu’accepte le chef de l’Etat.
Equipé d’un Nagra auquel s’ajoutera un synthétiseur, aidé d’un interprète, Simha Arom se rend dans les villages en pleine forêt où vivent les Pygmées. Enregistre les sons. Décrit et retranscrit des chants. Acquiert des instruments. Recueille les témoignages sur les usages et mythes associés. Se montre respectueux des Africains.
Au fil de rencontres et de hasards, ce musicien élabore et peaufine une méthode scientifique de travail et analyse des systèmes musicaux. Admiratif de la beauté et de la richesse des musiques des Pygmées, bouleversé et « ahuri » par leur complexité, il parvient à en décrypter la polyphonie vocale si élaborée, si différente de la musique occidentale par sa métrique, son rythme. Il érige en domaine d’étude respectable ces airs très savants interprétables avec beaucoup de variétés.
Devenu un ethnomusicologue de réputation mondiale, ce directeur de recherches émérite au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et récipiendaire de nombreux prix a protégé ce patrimoine musical traditionnel africain qu’il a fait connaître dans le monde entier par ses livres et films, puis dans des festivals prestigieux.
Dans son livre, Simha Arom communique son émerveillement pour l’ingéniosité humaine et transmet son savoir avec clarté.
Simha Arom, La fanfare de Bangui, Itinéraire enchanté d\'un ethnomusicologue. Ed. La Découverte, coll. Les Empêcheurs de penser en rond, 2009. 210 pages, 13 euros. ISBN : 9782707157225
Cet article a été publié en une version plus concise dans le n° 614-615, juillet-août 2009, de L’Arche.
Publié par Veronique Chemla le 11/08/2009 1